“Peuples ! Ecoutez le poète ! Ecoutez le rêveur sacré ! ». Ainsi,
Victor Hugo déclame l’importance du poète et de la poésie. Cependant, le poète
est toujours décrit comme ce « rêveur sacré », il s’agit du mythe du
poète traducteur inspiré, éclairé par un esprit divin, remontant au temps de Platon. La
poésie serait alors une manifestation divine que le poète vit à travers ses
sentiments. Ainsi, née la dimension lyrique de la poésie. Cependant, le mot poésie
dérive lui-même du verbe grec « poien » qui signifie
« créer ». Aussi, le poète est celui qui crée à partir de mots. Son
travail est vu comme l’aboutissement de la perfection du langage. Il est alors
légitime de se demander à quoi est destiné ce genre littéraire. Nombreux sont
ce qui le décrive comme l’aboutissement de l’expression sentimentale du poète.
Il s’agirait alors d’un genre purement lyrique dont le but est l’évocation des
sentiments. Dès lors, nous pouvons nous demander si la poésie n’est que
l’épanchement lyrique du poète.
Dans un premier temps, nous évoquerons l’aspect lyrique
de la poésie qui permet à l’auteur l’expression de ses sentiments. Dans un
second temps, nous mettrons en avant d’autres aspects de l’écriture poétique
qui font la richesse de genre littéraire.
D’une part, le genre poétique est destiné à l’expression
sentimentale du poète.
Tout d’abord, la poésie est née en Grèce antique et
dérive du mythe d’Orphée qui met en valeur l’aspect lyrique de ce genre. Orphée
est déclamé par Ovide et ensuite, par Virgile comme ayant un don réel pour la
musique et la composition. Ainsi, Apollon, dieu de la lumière, lui offre une
lyre à sept cordes, d’où dérive le mot lyrisme. Ce héro mythique est reconnue
pour avoir surmonté toutes les difficultés grâce à sa prose. En effet, par
amour pour Eurydice, il est allé jusqu’en enfer. Le poète traducteur est alors symbolisé
par le personnage d’Orphée. Il s’agit d’un héros qui par sa poésie sentimentale
émeut même les dieux des enfers. Ce mythe, symbole du lyrisme poétique, est
repris maintes fois dans la littérature. En effet, Apollinaire en 1910 décrit
la poésie d’Orphée comme « la voix que la lumière fit entendre ». Et
plus tard, Sartre compare Senghor, poète africain, à un « Orphée noir »
car il doit puiser dans son être la force pour écrire ses poésies aux émotions
profondes qui résultent d’une lutte pour la négritude. Ainsi, Le mythe d’Orphée
et Eurydice rappelle la nature lyrique de la poésie qui a pour dessein charmer
et émouvoir.
De plus, la poésie lyrique résulte d’une tradition
littéraire traduite en plusieurs langues. En effet, le sonnet illustre cet idéal poétique où le texte doit
charmer et émouvoir le lecteur ou la lectrice. Nous nous referons à la poésie
« courtoise » où l’amour est une vertu noble que chaque chevalier
doit posséder. Comme le souligne Marie de France dans le Lai de chèvrefeuille : « ni vous sans moi, ni moi sans
vous », ce vers suggère alors l’importance de la poésie amoureuse. Plus
tard, le sonnet né en Italie, de la prose de Pétrarque nous retrouvons cet
idéal féminin, Laure, qui est une source de sentiments poétiques. Louise Labé,
Du Bellay, ou encore Ronsard utilisent ce même thème de l’amour qui leur
inspire des sentiments dualistes, que l’on reconnait dans ce vers de Labé
« je vis, je meurs ». Ces poètes humanistes mettent en place les
fondements de la poésie et de la langue française. Ils deviennent alors un
modèle pour différents courants poétiques comme La poésie précieuse qui reprend
le thème de La belle Matineuse. Et
plus tard, Baudelaire, le poète moderne par excellence, usera la forme poétique
du sonnet pour exprimer l’ambigüité amoureuse, comme dans son poème A une Passante. Ainsi, nous comprenons
en quoi la forme poétique est indissociable de l’expression des sentiments.
Cependant, la traduction de la poésie lyrique n’est pas bornée à l’épanchement de sentiments amoureux et la
forme du sonnet. En effet, la poésie permet une liberté que ne permettent pas
les autres genres littéraires. Il n’y pas de longueur définie, ni de structure
imposée, les interprétations elles-mêmes peuvent être multiples. La poésie
permet alors à l’auteur d’ouvrir son esprit, comme le fait Baudelaire dans Les Fleurs du Mal. En effet, il dit lui-même ce qu’il ressent
dans ce recueil autobiographique de plus de 120 poèmes, « Le diable […] je
le sens en moi ! », ainsi, il exorcise ses propres douleurs à travers
une poésie nouvelle mais sentimentale.
Le poète fait part de ses angoisses et ses difficultés, « Que les
jours de malheur ? », Lamartine, dans Le
Lac, se demande la place du bonheur dans la vie d’un homme. De plus, la
femme est pour le poète un tremplin pour l’expression sentimentale. Cette
poésie lyrique va plus loin que l’amour car la femme y est idéalisée, elle
représente l’état d’esprit du poète plus que la femme en elle-même. Dans le
poème Elle était déchaussée de Victor
Hugo la jeune fille symbolise une volonté d’évasion du poète, une fuite de son
époque où tout est si faux et complexe. Baudelaire incarne ce Spleen, cette
fuite du temps, il utilise un lyrisme « noir » pour dénoncer ce mal
être intérieur, ce « venin ». Finalement, cet épanchement
sentimental permet aussi au lecteur de ce reconnaître dans cette poésie qui
transcende le langage pour toucher l’essence de l’esprit humain.
Nous pouvons ainsi dire que le poète use de la poésie
pour exprimer ses sentiments. Cependant, ce genre littéraire ne se borne pas
seulement au lyrisme, il est, aujourd’hui, composé de milliers de poésies traduites aux
thèmes variés.
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