La métamorphose, du grec
« meta » : changement et « morfée » : forme, est
un sujet qui intéresse et intrigue depuis l’Antiquité, de plus, la traduction professionnelle permet
encore aujourd’hui d’en retranscrire la puissance. Les transformations de
l’Homme peuvent être diverses, morales ou physiques, elles permettent à
l’artiste d’exprimer son point de vue sur la condition humaine.
Tout d’abord, Ovide
consacre plus de douze mille vers et quinze livres à La Métamorphose. À
travers son long poème épique datant de l’an 1, l’écrivain romain se pose comme
légitime héritier de la culture gréco-romaine. Son œuvre traduit un aspect
inquiétant de la métamorphose qui y devient irrémédiable et qui scelle
définitivement le destin des héros. Cependant, les causes de la transformation
humaine sont diverses, due à une punition des Dieux mais également à une
récompense. En effet, comme le sait tout bon traducteur littéraire, dans le mythe de Pygmalion, sa statue dont
il est éperdument amoureux devient femme par l’intervention divine d’Athéna. Le
procédé d’humanisation est alors intéressant, « statue animée rougit,
ouvre les yeux », il remet en cause également le rôle et la place de la
femme. Ce questionnement est parfaitement retranscrit par la traduction culturelle, qui ravive les
archétypes. Ainsi, la métamorphose devient une porte d’accès à un monde
inconnu, elle permet une échappatoire pour obtenir une vision nouvelle de
l’univers qui nous entoure.
Ensuite, ce thème est
repris bien des siècles plus tard par Kafka dans La Métamorphose. L’homme
devient un insecte par une transformation rapide et inattendue. Contrairement à
Ovide, celle-ci s’opère sans réelles raisons apparentes. Il s’agit d’un
bouleversement absurde de la condition du héros qui devient inutile et
marginal. Exclu par sa famille, il se métamorphose aussi moralement ne voulant
plus vivre, n’étant plus humain. La déshumanisation d’un homme quelconque ouvre
la réflexion sur l’existence elle-même, comme le souligne Kafka :
« exprimons le désespoir de l’Homme devant l’absurdité de
l’existence ». La traduction d’ouvrage doit alors permettre de faire naitre chez le lecteur les mêmes
sentiments profonds que souligne l’auteur. Ici, l’homme ne se reconnait plus
par ses actes et son apparence, de plus il n’existe plus aux yeux des autres et
face à soit même, il ne voit qu’un « monstrueux insecte ». Ainsi,
Kafka, à travers la métamorphose ouvre la réflexion sur la perception et de
soi-même face au changement. Il remet en cause l’identité de l’homme par son
apparence transformée, tout comme le mythe de Thésée
Enfin, le tableau
surréaliste de Dalí, La Métamorphose de Narcisse peint en 1937,
caractérise sa représentation du « poème paranoïaque ». Il s’agit
d’un terme utilisé par le peintre pour décrire « une méthode spontanée de
connaissance irrationnelle, basée sur l’objectivation critique des
interprétations délirantes ». Ainsi, transposé dans une autre langue la
subtilité de la pensée de Dalí requiert la maitrise et le savoir des traducteurs professionnels. De plus, la représentation de l’homme comme il
se perçoit dans cette œuvre, dénote une obsession pour lui-même. Comme le
souligne Ovide, l’Homme est « éprit de son image » et ne peut se
séparer de son reflet tout en se dépérissant. Cependant la métamorphose peinte
par Dalí est peu claire et laisse le spectateur pensif. En effet, il est
impossible de connaître le sens de la transformation : Qui est la fausse ?
Qui est la vraie ? face de l’Homme et du traducteur.
Finalement, la
métamorphose est un thème récurrent utilisé notamment au XX° siècle. Cette
méthode permet de souligner, tout d’abord, les aspects négatifs de
l’Homme : sa face cachée. Ensuite, la futilité et vulnérabilité de
l’existence est mise en avant. Et enfin, l’artiste défet la perception que
l’homme a de soi-même et sa volonté à se conformer. Tout comme dans Rhinocéros
de Ionesco où la résistance face à la métamorphose dénonce le
conformisme : « ce sont toujours les consciences isolées qui contre
tous représentent la conscience universelle ».
La traduction permet
alors aux artistes de véhiculer leurs idées dans le monde entier, et pour
pouvoir en retranscrire la subtilité le traducteur d’ouvrage se doit d’être érudit et judicieux.
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